Balak, le roi de Moav, convoque le prophète Bilaam pour qu’il maudisse le peuple d’Israël. En chemin, Bilaam est interpelé par son âne qui voit, avant Bilaam, l’ange que D.ieu a envoyé pour entraver leur route. A trois reprises et de trois différents points de vue, Bilaam tente de proférer ses malédictions. Et chaque fois, des bénédictions sortent de sa bouche. Bilaam prophétise également la fin des temps et la venue de Machia’h.
Le peuple tombe sous le charme des filles de Moav et est influencé à servir leur idole, Péor. Quand un officier de haut rang conduit publiquement une princesse midianite dans sa tente, Pin’has les tue tous deux, interrompant la plaie qui fait rage dans le peuple.
Le nom de cette Paracha, Balak, soulève une question : Balak était un homme impie, un roi immoral qui haïssait le Peuple juif et voulait l’annihiler. Nos Sages statuent que l’on ne doit pas nommer une personne sur un homme mauvais. Il est sûr que ce principe s’applique également au nom d’une partie de la Torah. Pourquoi donc ce nom est-il immortalisé comme titre d’une Paracha ?
Essayons de répondre à cette question. La Torah relate la façon dont Balak loua les services de Bilaam, un mystique pervers et perverti et lui demanda de maudire le Peuple juif. Mais D.ieu empêcha la réalisation de ce projet malveillant, puisqu’à chaque tentative de malédiction, D.ieu le força à prononcer un flot de bénédictions puissantes à leur égard, y compris des bénédictions qui se réaliseront et seront visibles à la venue de Machia’h.
Nommer la Paracha Balak est un moyen de nier et de transformer les forces qui lui sont associées. Le nomBalak sert de source éternelle d’influence positive, écrasant toute force qui tente de faire du mal au Peuple juif et montrant comment elle peut être transformée en bénédiction et en bien.
Cela reflète le but ultime de la Torah : non seulement nous protéger et nous sauvegarder de toutes les influences indésirables mais également les transformer en forces qui nous aident, leur permettant ainsi de remplir leur rôle dans le projet Divin.
Cependant, cette réponse soulève une autre question. En effet, il aurait donc paru plus adéquat de nommer la Paracha Bilaam et non Balak. Après tout, Bilaam était également un homme mauvais et ce fut lui, et non Balak, qui prononça les bénédictions à l’égard du Peuple juif. Pourquoi est-ce donc Balak dont le nom est pérennisé et non celui de Bilaam ?
Une leçon importante se dégage de la réponse. Balak nous enseigne que nous devons utiliser le potentiel que nous possédons pour susciter des activités positives. Il ne suffit pas d’attendre patiemment que l’on demande de nous une contribution pour nous engager. Tout comme Balak, nous devons faire le premier pas pour immortaliser notre héritage de la Torah.
Entamer quelque chose est difficile : il faut combattre l’inertie. C’est la raison pour laquelle la Torah utilise cet exemple. Il s’agit d’éveiller notre prise de conscience sur le fait qu’il faut être actif. Non seulement devons-nous répondre à notre environnement de la manière indiquée par la Torah mais il nous faut prendre des mesures pour changer cet environnement, en suivant les lignes directrices de la Torah.
Perspectives
Selon la Loi juive, la Haftara hebdomadaire (lecture additionnelle d’un autre passage du Tana’h) reflète le contenu de la Paracha, dans son ensemble. Le lien entre la Paracha de Balak et sa Haftara est évident. La Haftara relate comment D.ieu commande au Peuple Juif : «Ma nation, souvenez-vous du conseil donné par Balak, roi de Moav, et la réponse de Bilaam, fils de Beorgavetim de Chitim».
Aussi évident qu’elle paraisse, cette connexion semble cependant superficielle parce qu’elle ne paraît mentionner que le nom des principaux protagonistes de la Paracha. Aucun lien n’apparaît avec son thème général.
Mais en réalité, le lien entre les deux lectures émerge du fait qu’elles évoquent toutes deux une transition latente. La lecture de la Torah parle du moment où les Juifs étaient «dans les plaines de Moav, en face de Jéricho, au Jourdain», prêts à pénétrer en Erets Israël. Et la Haftara évoque le temps du début de la Rédemption où ont lieu les derniers préparatifs avant la réalisation de la Rédemption ultime.
Cette période de transition sera semée d’embûches. C’est pourquoi la Haftara nous dit de «ne pas espérer en l’homme ni d’attendre d’un mortel». Mais il faut concentrer sa foi et sa confiance vers le Haut (D.ieu).
Cela nous permet de comprendre le rapport avec l’entrée du Peuple juif en Israël. Dans le désert, le peuple était nourri par la Manne. Autrement dit, leur vie était contrôlée par un mode d’existence miraculeux. Il n’était pas possible de se tromper en pensant que l’impact humain pouvait faire une différence. Plus encore, chaque jour, seule une quantité de Manne nécessaire pour le jour tombait. Cela mettait l’accent sur le fait que l’on doit avoir une confiance absolue que D.ieu pourvoira à nos besoins, jour après jour.
Par contre, l’entrée en Israël allait faire émerger un tournant dans l’activité humaine. Ils allaient devoir cultiver leurs propres champs et gagner leur subsistance par leurs propres efforts. Dans une telle situation, il est possible que l’homme erre, qu’il s’imagine que sa subsistance dépend d’autres facteurs et qu’il mette tous ses espoirs dans l’homme. Nous ne parlons pas de quelqu’un qui fait des choses interdites mais simplement de celui qui pense que s’il travaille plus dur, s’il investit son temps, son énergie et ses ressources correctement, il prospérera.
En termes simples, il s’agit d’une approche incorrecte. En réalité, chacun doit reconnaître que la même dépendance absolue de D.ieu, que celle qui prévalait dans le désert, est toujours nécessaire.
Cela signifie-t-il donc qu’il ne nous reste alors qu’à attendre tranquillement et espérer les miracles ? Non ! La Torah nous enseigne : «D.ieu te bénira dans tout ce que tu feras». Il faut donc créer un réceptacle pour permettre aux bénédictions de se manifester. Mais pourquoi faut-il «faire» ? Certainement pas parce que l’ordre naturel aurait une signification par ou en lui-même. Ce n’est rien de plus qu’ «une hache entre les mains du bûcheron», le moyen qu’utilise D.ieu pour envoyer Ses bénédictions. Il est vrai que nous devons utiliser ce moyen : travailler et même travailler dur, mais nous devons être conscients que la source de notre succès ne se trouve pas dans nos propres efforts mais dans les bénédictions de D.ieu.
A l’époque de la première entrée en Erets Israël, la conscience engendrée durant le voyage dans le désert avait pour but d’influencer la conduite des Juifs lorsqu’ils allaient prendre possession de la terre. De la même façon, la connaissance de la nature Divine de toute existence qui prévaudra à l’Ere messianique doit impacter notre vie présente. Car, dès à présent, nous pouvons avoir un avant-goût de l’Ere future, en prenant conscience que nous avons reçu une bénédiction unique et la prospérité, grâce à la générosité Divine.