Fêter un « nouvel an des arbres » soulève des interrogations traditionnelles. De fait, Tou Bichevat, le 15 Chevat, ouvre la semaine et il suscite un étonnement renouvelé.

L’homme et l’arbre… certes les symboles sont présents, et forts pour certains d’entre eux. La nécessité de racines, la stabilité du tronc, le développement des branches et l’aboutissement des fruits en sont des exemples notables. Verset à l’appui – « l’homme est un arbre des champs » – la légitimité de cette fête est établie de longue date dans la conscience juive. Cependant, une dimension nouvelle s’y ajoute aujourd’hui. Le rapport hommes/fruits invite chacun à poser son regard sur le monde qui l’entoure.

En effet, dès que l’histoire a commencé, l’homme a entrepris de dominer la terre, de la soumettre à sa volonté, de la faire répondre à ses besoins. Cette démarche a fondé la civilisation, elle a exprimé de manière parfaite une réalité essentielle : l’homme est le couronnement de la création. L’action humaine, transformatrice par essence, n’était pas pour autant séparatrice de l’homme et de son milieu naturel. Celui-ci restait l’indispensable toile de fond de la vie. Les prières pour la pluie ou la rosée, pour des récoltes abondantes etc. en témoignent dans la liturgie jusqu’à nos jours. Il ne pouvait en être autrement, c’était une question de survie, mais aussi une question de conscience. Le récit de la création dans la Torah ne souligne-t-il pas que le Créateur plaça l’homme dans le jardin d’Eden « pour le travailler et le garder » ?

La double expression contenue dans cette partie de verset interpelle. « Le travailler et le garder », c’est en faire usage et, en même temps, le préserver. Il y a ici comme un appel ou une leçon. L’homme peut-il vivre en ne regardant que lui-même ? Peut-il se satisfaire d’une sorte de situation « hors-sol » où, détaché de tout ce qui l’entoure, il finit par oublier ce qu’il est essentiellement : une créature de D.ieu chargée d’une mission exigeante. Cette exigence de vie totale retentit tant dans le domaine du matériel que dans celui du spirituel. Car c’est le monde de D.ieu qu’il nous est donné de construire. Et c’est par le parachèvement de notre action qu’il révèlera son essence Divine, devenant ainsi, dans les termes du Cantique des cantiques, le « jardin » de D.ieu.