Les trois dernières plaies accablent l’Egypte : une armée de sauterelles dévore les cultures et la végétation ; une obscurité épaisse, palpable enveloppe le pays et tous les premiers-nés de l’Egypte sont tués aux coups de minuit, le 15 du mois de Nissan.

D.ieu ordonne la première Mitsva au Peuple d’Israël : celle d’établir un calendrier basé sur le renouvellement de la lune. Les Hébreux sont également enjoints d’apporter une « offrande pascale » à D.ieu : un agneau ou un chevreau doit être abattu et son sang aspergé sur les jambages ou les linteaux de chaque demeure des Hébreux, pour que D.ieu « passe par-dessus » ces foyers quand Il viendra tuer les premiers-nés égyptiens. La viande rôtie de l’offrande sera consommée en cette nuit avec la Matsa (pain non levé) et les herbes amères.

La mort des premiers-nés finit par briser la résistance du Pharaon et il renvoie littéralement les Enfants d’Israël de sa terre. Ils doivent s’en aller dans une telle hâte que leur pâte n’a pas le temps de lever et les seules provisions qu’ils emportent sont ce pain non levé. Avant de partir, ils demandent à leurs voisins égyptiens de leur remettre de l’or, de l’argent et des vêtements, réalisant ainsi la promesse faite à Avraham que ses descendants quitteraient l’Egypte avec de grandes richesses.

Les Enfants d’Israël reçoivent le commandement de consacrer tous les premiers-nés et de célébrer chaque année l’anniversaire de l’Exode, en se débarrassant de tout le levain en leur possession pendant sept jours et de raconter leur rédemption à leurs enfants. Ils sont également enjoints de mettre les Téfilines sur le bras et la tête en souvenir de l’Exode et de leur engagement à D.ieu.

La vitesse en trois dimensions

« Et vous le mangerez ainsi : vos hanches ceintes, vos chaussures aux pieds et votre bâton dans la main. Mangez-le dans la hâte, c’est une offrande de Pessa’h pour D.ieu. » (Chemot 12 :11)

Nos entreprises dans la vie peuvent se diviser en trois catégories générales. Tout d’abord, nous aspirons à nous améliorer et à développer nos propres talents ou notre potentiel. Puis nous nous impliquons dans notre propre « part dans le monde », notre famille, notre profession, notre cercle social et les ressources naturelles que nous consommons ou que nous développons. Enfin, nous agissons sur le macrocosme : les événements du monde, le progrès de l’histoire ou la création en tant qu’entité.

Bon nombre parmi nous estiment que ce dernier domaine est tout à fait inaccessible à notre zone d’influence. La vérité est pourtant que chacun de nos actes exerce un impact sur le monde dans lequel nous vivons, que nous en ayons conscience ou non.

« Un éternuement dans le New Jersey peut provoquer un ouragan en Chine ». Tels sont les mots par lesquels un célèbre scientifique illustrait la globalité de l’univers physique.

Selon les paroles du Rambam (Maimonide) : « l’homme doit toujours se considérer comme partagé de manière proportionnelle : à moitié bon, à moitié mauvais. De la même manière, il doit voir le monde comme à moitié bon et à moitié mauvais… de sorte qu’avec un acte unique, il peut faire basculer le fléau de la balance, pour lui-même et pour le monde entier, du côté du bien » (Michné Torah, Lois de la Techouvah, 3 :4).

De la passivité à l’activité

La sortie d’Egypte marque la naissance de notre peuple, le moment où « nous fûmes extraits (par D.ieu) du sein d’un peuple », où nous fut attribué le don de la liberté et nous fut donnée la possibilité de concrétiser la bonté et la perfection divines dans notre propre vie et dans le monde qu’Il a créé.

L’un des thèmes essentiels dans l’histoire de la sortie d’Egypte est renfermé dans le mot « hâte ».

Les Enfants d’Israël sont décrits comme ayant « fui » l’Égypte. La Matsa est le pain qui n’eut pas le temps de lever parce que nous fûmes « renvoyés d’Égypte et que nous ne pouvions nous y attarder ». Et l’offrande de Pessa’h, la clé de la libération et l’axe autour duquel tourne la fête de Pessa’h, fut mangée « dans la hâte ».

L’empressement de la sortie d’Egypte met l’accent sur le fait que la vie, pour un Juif, ne doit jamais plus être une expérience passive et statique, comme elle le fut pour les esclaves hébreux sous le joug égyptien. La vie doit être un mouvement vigoureux, vibrant, vers l’avant, une quête incessante de progrès et d’accomplissements.

Un bâton qui s’étend

L’empressement dans lequel fut mené le premier Séder s’exprime de trois manières : « vos hanches ceintes, vos chaussures aux pieds et votre bâton dans la main ». Cela correspond aux trois dimensions de la marche en avant de notre vie que nous avons évoquées plus haut : notre développement personnel, notre influence sur notre environnement proche et notre impact universel.

Les hanches, qui représentent « la base qui soutient le corps entier », correspondent à l’être humain, en tant qu’individu. « Vos hanches ceintes » se réfère donc à l’entreprise de développer notre potentiel personnel.

Les pieds servent de moyen de locomotion à l’individu. Équiper les pieds de chaussures signifie se donner les moyens de traverser des terrains hostiles qui, sinon, nous empêcheraient de nous déplacer. Avoir les pieds chaussés représente donc notre aptitude à voyager du lieu fermé que représente le moi et de sortir du domaine d’une personnalité qui serait « pieds nus », une personnalité centrée sur elle-même.

Mais nous sommes plus que des voyageurs dans la vie.

La race humaine est unique parmi les créatures dans la mesure où nous faisons un usage important d’«outils », des choses que nous façonnons et qui nous permettent de manipuler notre environnement d’une manière impossible pour notre corps et ses facultés seuls. Si nous ne pouvons quasiment pas soulever l’équivalent de notre propre poids avec nos deux mains, nous avons appris à littéralement bouger des montagnes avec les engins que nous avons créés. Si nos deux pieds, nus ou chaussés, ne peuvent nous transporter qu’à une distance limitée, nous avons exploré les profondeurs de la mer et des hauteurs astronomiques avec des véhicules de notre invention.

C’est là que se découvre le sens du troisième signe d’empressement de la sortie d’Egypte : « le bâton dans votre main ». Le « bâton » représente la conviction humaine unique que rien n’est impossible, que nous pouvons toujours trouver le moyen d’aller bien au-delà de la distance naturelle que nous atteignons à bout de bras, la conviction que chacun d’entre nous possède la capacité d’exercer une influence positive sur tout le monde, sur tous les éléments et sur tous les événements de notre monde, aussi distants et étrangers à notre vie qu’ils puissent paraître.